mardi 6 septembre 2011

Beverly Hills

Le minibus sans toit offre une splendide vue sur les longs palmiers d’Hollywood. Curieux arbres, avec leur tronc interminable surplombé d’un petit panache de palmes. Nous les voyons défiler au-dessus de nos têtes alors que le véhicule s’approche du quartier des stars. Notre chauffeur, Alan, sert aussi de guide. Il parle beaucoup et avec enthousiasme dans un micro-cravate. Nous entendons son verbiage à travers un casque audio.

Bientôt nous voilà à Berverly Hills. Le quartier est très vert, si vert que la végétation cache par son épaisseur la vue que l’on pourrait avoir sur les résidences. De temps à autre le bus stoppe et nous apercevons, à travers un petit espace dans les frondaisons, un peu de mur blanc avec un œil de bœuf surmonté d’un morceau de toit rouge, bref un bout de villa. C’est là qu’habiterait, ou aurait habité, une actrice dans le vent ou un chanteur à succès. Alors, chacun brandit son appareil et photographie le petit bout de villa. Le bus repart et s’arrête bientôt devant un portail. Attention, pas n’importe quel portail : derrière celui-ci se trouve la somptueuse propriété de telle star, avec escalier de marbre, ses vingt-huit chambres et sept salles de bain. Alors, tout le monde brandit de nouveau son appareil et photographie le portail.

Je me demande ce que les touristes feront avec ces photos. Rentrés chez eux, ils les présenteront à leurs amis et collègues en expliquant que se trouve, derrière cette bête plaque de fer forgé, la somptueuse propriété de telle star, avec escalier de marbre, ses vingt-huit chambres et sept salles de bain ? Y mettront-ils au moins le même enthousiasme que notre guide visiblement transporté par toutes les merveilles invisibles qu’il nous décrit par le menu, comme s’il en était le secret architecte ?

Le minibus croise le chemin d’une dame d’un certain âge. Elle promène simplement son chien. Alan (sournois personnage) ralentit insensiblement, et voilà vingt objectifs nerveusement pointés vers la pauvre dame, aussitôt numérisée en milliards de pixels. Vous voulez répandre votre image aux quatre coins du monde ? Emmenez Mirza faire ses besoins à Beverly Hills.

Cette première partie nous a donc présenté quelques murs, beaucoup de haies, et des portails célèbres. Le quartier est calme, certes, et plutôt agréable, il faut bien le reconnaître. Je ne sais pas à quoi je m’attendais en achetant le billet pour cette coûteuse expédition, mais certainement pas à me faire transporter entre murs, haies et portails au son d’un commentaire exalté.

Le guide décrète que nous avons eu notre content de visions de rêves à Beverly Hills et dirige tout de go son véhicule vers un quartier résidentiel voisin. Il s’arrête devant quelques villas en nous demandant de regarder comment sont ornés leurs jardins. Ici, une haie en forme de voiture, là, un buisson taillé en lama, et ainsi de suite. Je me demande s’il ne va pas poursuivre en nous présentant des collections de nains de jardin en salopettes, avec brouettes et bonnets rouges. Une voiture particulière, mécontente des arrêts fréquents de notre bus, réclame le passage et finit par nous doubler avec un bref coup de klaxon. « Oh, you know, people here… They really hate us », nous confie Alan dans un accès de franchise. Je pense qu’il est dans le vrai, tant moi-même pense saisir les raisons de cette haine.

Nous continuons le périple par le quartier commerçant. Rodeo drive, ses boutiques de luxe avec sa clientèle argentée, ses tarifs exorbitants et ses parcmètres qui acceptent les cartes de crédit. Je tends le cou pour voir si les consommatrices du coin ressemblent à Julia Roberts, mais je vois surtout des femmes voilées.

Le minibus s’oriente enfin vers les hauteurs de la ville. Nous traversons des quartiers qui nous font penser au film La défense Lincoln. Enfin le véhicule s’immobilise. En face de nous, à flanc de colline, les lettres toutes blanches H O L L Y W O O D. « Le symbole le plus photographié au monde », tonitrue Alan dans mon casque comme s’il découvrait à l’instant même le célèbre alignement.

Le minibus nous laisse dans un parking quelque part derrière le Théâtre Chinois. C’est l’heure du déjeuner. Nous avons faim, le soleil a tapé très fort, et Alexandra s’est ennuyée pendant toute la visite. Ce n’est pas un bon moment pour les enfants. Et si on me demande mon avis, pour les adultes non plus.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire