dimanche 29 septembre 2013

8. Pierres et vacances

Double Arch


"C'est incroyable qu'il y ait tant d'arches dans le parc précisément appelé Arches", s'extasie une touriste à quelques mètres de nous. Ce mot désarmant me rappelle l'admiration d'un de mes amis devant le fait que l'eau bout exactement à 100 degrés, preuve ontologique à l'en croire de l'existence de Dieu.

Après l'épreuve inattendue de Delicate Arch, les autres randonnées dans le parc nous paraissent d'une facilité déconcertante. Le seul danger reste la morsure du soleil - si l'on fait exception des grappes de voyageurs. Sitôt débarqués de leur autocar, ces personnes sans doute charmantes individuellement mais insupportables en groupe se défoulent en piétinant avec une sonore allégresse les grands espaces. Nous en trouvons une belle brochette à Sand Dune Arch où certaines d'entre elles s'emploient à gâcher l'endroit par des jeux de plage bruyants et bébêtes que je pensais réservés aux littoraux fatigués de notre contrée.

Un "caterpillar"
Cette courte promenade, relativement ombragée par des gros rochers, est envahie de chenilles, sans doute la dernière bestiole qu'on s'attendrait à trouver dans ce "pierres et vacances" aride.

A l'ombre de la Pine Tree Arch

Une arche en sursis : la Lanscape Arch


Le chemin de Pine Tree Arch est moins facile d'accès et de ce fait plus accueillant pour les amateurs de nature. L'on peut même souffler à l'ombre bienvenue de l'arche. Cela est rare : beaucoup de ces formations sont en hauteur, difficiles voire interdites d'accès. C'est le cas pour la Landscape Arch dont la structure s'était en partie effondrée en présence de visiteurs, heureusement sans faire de victimes. La voûte est maintenant fragile et on s'attend à la voir s'écrouler pour de bon. Aussi a-t-on jugé bon d'en protéger l'accès par des barricades. Tout en enviant le touriste qui a eu la chance d'immortaliser la première catastrophe, je tiens mon Pentax fermement à l’affût de l'événement fatal. Mais quand nous repartons le bel arc de roche est toujours aussi vaillant, aussi précaire soit-il. Paris-Match attendra.


Parade of Elephants


Sur le sentier de Double Arch nous contemplons deux curiosités de taille. La première est la silhouette en trois dimensions d'un éléphant massif, avec toutes ses caractéristiques, sa bosse sur le crâne, sa trompe dressée vers le ciel et même l'emplacement des yeux.

La deuxième n'est pas documentée dans nos guides. Avec un pincement au cœur, je reconnais pourtant le PacMan, ou plus exactement son fossile de roc, en bordure du sentier. Son œil vif s'est éteint, et sa gueule mangeuse de fantôme reste crispée dans un dernier effort. Est-ce ainsi que périssent les héros de notre enfance ?

RIP PacMan



A deux pas de Moab coule le Colorado. Les Américains disent "river", mais c'est un faux-ami : le Colorado est bel et bien un fleuve. Je m'attendais à trouver le flot impérieux d'un court d'eau au nom si mythique. Pourtant non, le Colorado n'est pas très large. A cet endroit son lit est bordé par une falaise à pic ; du côté de la route, le sol forme une pente douce jusqu'à l'eau. J'identifie un endroit où le fleuve décrit une courbe et pense trouver à cet endroit une plage, comme on me l'avait enseigné à l'école. L'instruction publique disait vrai. Après cinq minutes de marches entre buissons sec et gravillons nous plongeons nos pieds dans le Colorado. Son opacité et la force avec laquelle il bouscule ses obstacles nous font deviner sa puissance. Gare à l'inconscient qui voudrait s'y baigner !

Après Moab nous nous rendrons à Page, au nord de l'Arizona, mais avant cela une étape est prévue à Bluff - où l'on ne saurait malgré son nom trouver une table de poker : une seule épicerie et trois restaurants isolés ne suffiraient certes pas à retenir les amateurs.


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